Innovation stratégique, stratégie de rupture, innovation de rupture, stratégie océan bleu, mais qu’est-ce que c’est ?

Première remarque : à tout produit ou service, correspond une stratégie de positionnement sur le marché, qu’elle soit réfléchie ou construite au feeling par l’entrepreneur. Ce sont les stratégies business, qui ont notamment été définies par le chercheur en stratégie le plus connu : Michael Porter.

Un exemple : une montre de luxe, ou tout produit de luxe, correspond à une stratégie dite d’enrichissement : on enrichit les critères du produit pour  que l’avantage concurrentiel, ce petit truc qui fera que le client potentiel craquera pour votre  produit et pas celui du concurrent, soit basé sur la différence : l’avantage du produit, c’est sa qualité.

 

A l’opposé, un stylo à bille de marque BIC, correspond à une stratégie de domination par les coûts : l‘important volume de vente du leader, BIC,  lui permet de disposer d’économies d’échelle : plus il produit, plus il est efficace pour produire. Ramener au coût de production pour une unité son stylo sera produit moins cher que les concurrents, donc proposé à la vente à un prix inférieur, ce qui attirera les clients potentiels : l’avantage, c’est le prix.

 

A ce stade, nous pouvons faire 2 remarques très pertinentes :

 

  1. Plus on monte en gamme, plus le produit coute cher à produire. Au final, si nous nous intéressons au rapport valeur perçue par l’utilisateur (ou valeur à l’usage) / coûts de production, ce rapport est bien souvent similaire.
  2. Que ce soit, pour un produit haut de gamme et encore plus que bas de gamme, chaque produit restera in fine très proche de celui de ses concurrents : une montre de luxe restera une montre de luxe. La concurrence sera donc frontale. En conséquence, à qualité égale, le premier critère de choix… c’est le prix. Pour gagner la compétition, un acteur du marché devra améliorer sa productivité… ou baisser ses marges. Métaphoriquement, on dit que l’océan (le marché) rougit du sang des compétiteurs. C’est ce qu’ont démontré Chan Kim et Renée Mauborgne, chercheurs à l’INSEAD.

Comme tous produits et services correspondent logiquement à une stratégie business bien précise, Kim et Mauborgne se sont penchés sur tous les cas de lancement de produits/services depuis la révolution industrielle. Dans un sens, ils ont réalisé un travail d’historien des entreprises et de leurs produits.

Surprise : certaines success stories, comme par exemple la Ford T, ne correspondent pas aux stratégies business structurées par Porter, où le décideur doit faire le choix obligatoire entre la voie de la différence, ou de l’excellence (le produit le moins cher à produire grâce à des volumes importants)… le rapport valeur à l’usage / coûts de production est dans ces cas largement supérieur : ces produits, à leur usage, apporte plus de bénéfices à leur utilisateurs que leurs coûts de production, comme ce fut le cas des Hôtels Formule 1 à leur lancement.

C’est de ces analyses que sont nés les concepts d’innovation stratégique :

Dans ces cas d’entreprise : une rupture est créée où la valeur à l’usage du produit excède très largement les coûts de production. Imaginons un acheteur potentiel : voyant toute la valeur de l’usage d’un produit radicalement nouveau, valeur qui n’a rien à voir avec son prix d’achat… il craque, comme nous avons tous craqué pour un iPhone. Pour le prix d’un iPhone, nous avons en un seul objet 3 dispositifs différents : un téléphone portable (remarquez les conséquences pour Nokia), un baladeur mp3, un PDA et organiseur personnel (c’est-à-dire un PALM. Notez les conséquences pour cette entreprise). Et ce n’est pas tout : d’un point de vue de l’usage, nous pouvons jouer comme sur une console mobile, acheter de la musique, des applications, des jeux et des films de n’importe où, lire la presse, sans compter les innombrables applications.

Ces même chercheurs ont aussi fait une remarque : petit à petit, les secteurs (et leurs produits correspondants),  se sont construits autour de règles qui sont restées de mise générations de produits après générations de produits.

Un exemple : la forme actuelle d’un guidon de moto ou d’un vélo de ville, correspond à la forme inventée il y a un siècle pour les premiers vélos : la forme n’a pas évolué depuis : c’est une règle ancrée dans les schémas de réflexion dans l’industrie du cycle… qui en oublie que l’on pourrait, peut-être , aujourd’hui, concevoir un guidon plus ergonomique, efficient.

Voici une illustration de ces propos : en tant que professionnels de la fabrication des guidons de vélos de courses, nous vous affirmons qu’il ne peut exister un guidon plus ergonomique que le guidon traditionnel. Puisqu’on vous le dit : non, soyons conservateurs, haro sur l’innovation. Cela a toujours été comme cela et le restera !

Résultat des courses : Laurent Fignon perd le tour de France en 1989  face à Greg Lemond, qui a utilisé un guidon révolutionnant l’aérodynamique du coureur lors d’une épreuve de contre la montre.

 

Première définition : l’innovation

Une innovation est une invention humaine qui est industrialisable et qui rencontre un succès commercial.

 

Suite à cette définition, nous pouvons classer l’ensemble des innovations à l’aide de deux classements différents :

Premier classement :

Innovation de rupture / innovation d’amélioration.

Une innovation de rupture bouleverse l’état existant et impacte à grande échelle un ou plusieurs secteur.

Un exemple : le capteur CCD, qui a permis la photographie numérique. Cette innovation de rupture a bouleversé nos habitudes : la plupart des photos sont aujourd’hui prises avec nos téléphones portables, l’industrie argentique a disparu et avec elle la filière du développement des photographies.

A l’opposé, une innovation d’amélioration permet, comme son nom l’indique, d’améliorer une invention existante pour la rendre plus efficiente.

 

Second classement :

Innovation technologique / innovation stratégique.

Des success stories s’expliquent par une technologie : le capteur CCD rentre lui aussi dans ce cas, comme le téléphone portable, internet et son cortège de TIC, etc.

D’autres success stories ne s’expliquent pas par l’invention d’une nouvelle technologie : c’est le cas de Zara, Free Mobile, Ralph Lauren, les hôtels Formule 1, etc.

Elles ont pour source une innovation d’un autre ordre  : une innovation stratégique.

 

Globalement, une innovation stratégique permet en même temps :

  • D’offrir plus de valeur à l’usage du produit ou du service, on parle d’innovation douce (soft innovation en anglais),
  • De disposer d’une structure de coûts de production plus faible ou plus agile.

Cette réduction de couts de production peut avoir deux sources :

  • Le modèle économique de l’entreprise dans son ensemble est plus léger et adaptatif,
  • Des critères du produit établis par le marché peuvent être chers à produire, mais n’intéressent peu l’utilisateur et peuvent donc être diminués voir éliminés. Exemple : la qualité de la vidéo chez la console Wii de Nintendo.

 

Nous pouvons à ce stade faire une remarque : les deux classements peuvent être croisés : nous parlerons alors de technologie de rupture, technologie d’amélioration… et de stratégie de rupture.

 

Globalement, les innovations stratégiques regroupent donc les innovations sur le business model (exemples : les modèles économiques d’Apple, Zara, le journal Metro, Blablacar, Uber) et les stratégies de rupture (exemple : Airbus A380). Certaines stratégies de rupture vont plus loin : en plus de la rupture stratégique, elles créent un nouveau marché dénué de concurrents (donc de pression pour l’entreprise) : on parle alors de stratégie océan bleu (exemples : Wii de Nintendo, iPod, iPhone, iPad, la chaîne d’hôtel Formule 1).

Pour en savoir plus sur ce qu’est une stratégie océan bleu, vous pouvez consulter la page méthode stratégie océan bleu, ainsi que le support de la web conférence sur le sujet.

Pour ce qui est d’inventer un business modèle innovant ou disruptif, l’entreprise doit appréhender la façon dont elle créée de la valeur, penser à créer de la valeur pour l’ensemble des parties prenantes, (les partenaires clefs, les utilisateurs des produits et services, etc), mais ausi comment elle distribue cette valeur, sa relation avec ses clients enfin sur quel mode elle va se rémunérer (publicité, service gratuit pour un groupe de clients et payant pour un second (TF1, Facebook), location, vente directe, leasing, service simplifié avec accès gratuit pour un groupe d’utilisateurs, payant avec des services complémentaires (Skype), etc. C’est donc une démarche intellectuelle très créative, similaire au design mis en oeuvre par un architecte, qui va intégréer dans sa réflexion des dimensions sociétales, règlementaires,  ergonomiques. On parle donc de design de business models (innovants ou disruptifs).

 

Créer de telles innovations demande donc de sortir du cadre, pour dans chacun des cas, se réinventer, réinventer son secteur. C’est ce qu’a démontrer Clayton Christensen, chercheur à Harvard Business School.

 

Avoir la bonne idée au bon moment, être capable de penser en rupture, créer quelque chose de radicalement nouveau est possible, mais statistiquement assez rare.

 

L’avantage de tous ces travaux de recherche menés à l’INSEAD, Harvard Business School et HEC Lausanne, c’est qu’ils ont débouché sur des méthodologies, processus, démarches stratégiques : en se donnant un temps dédié à cette réflexion et en mettant en oeuvre principes, outils dans une démarche intellectuelle dédiée, il est possible de créer de façon sécurisée de possibles innovations disruptives ou business models disruptifs.

 

Appliqués par des sociétés comme SEB, APPLE, Nintendo, ce sont ces démarches stratégiques qui ont générer les concepts de :

  • L’iPhone et l’iPad d’APPLE,
  • La friteuse sans huile de SEB,
  • Le Cirque du Soleil,
  • La console de jeu Wii de Nintendo.

 

Dans de futurs articles, vous découvrirez les outils et chaque réflexion qui a été menée pour construire un projet de produit tel que l’iPhone.